Ne tenant du savoir que quelques rudiments,
l’ingénu que je suis fait montre de méfiance
envers vos lettres qui semblent si hardiment
s’arroger le pouvoir d’ensorceler nos sciences.
De tous les horizons mélanges de symboles
mais sous domination franchement hellénique,
les formules pendues à mes carreaux m’affolent
au point d’avoir rendu ma plume laconique.
Discriminant par-ci, somme et produit par-là :
ingrédients bien précis de la lourde potion
qui fait voir l’invisible et démentiel Horla
dont me voici la cible évidée d’émotions.
Permettez toutefois, maléfiques langages
ce dernier soubresaut de victime envoûtée.
Ma menaçante voix vous le dit sans ambages :
mon encre en cent ruisseaux saura vous dérouter.
Enfumez-moi l’esprit, je tordrai votre essence
et vous asservirai par des raisonnements
qui mimeront le vrai sous de beaux ornements
dans le plus grand mépris des logiques décences.
L’étincelant poignard de mes perfides ruses
de vos antiques traits se trouvera serti.
Un effrayant pouvoir dont il est temps que j’use !
Par vous je tromperai jusqu’aux plus avertis.
– J’aimerais bien voir ça, s’exclama de l’estrade
l’homme à la barbe blanche et à l’œil amusé.
Mon feutre rouge aura toujours une parade
à vos faux arguments même les plus rusés.
L’élève se rendit compte bien en retard
que son for intérieur avait pris le micro,
et qu’en ce samedi matin le vieux renard
– son futur correcteur – se pourléchait les crocs.
A.H.